Quelque part dans les limbes se retrouvent les anticolonialistes tué∙es par les forces impérialistes. Cela va de Martin Luther King à Ben Laden, de Jean Jaurès à Thomas Sankara… Ils et elles sont réuni∙es là par Ota Benga, un Pygmée d’Afrique centrale qui après avoir été une attraction touristique aux États-Unis, au début du 20e siècle, s’est suicidé en 1916. Cette rencontre permet à l’autrice de présenter les horreurs de la colonisation, liées aux besoins d’expansion du capitalisme. Faisant dialoguer Rosa Luxembourg avec Che Guevara… elle retrace l’histoire particulièrement sombre du Congo qui a appartenu un temps au seul roi des Belges, mais également la ségrégation aux États-Unis après la fin de l’esclavage. Ce scénario astucieux lui permet de présenter les rapports alarmants enterrés de l’époque, les mobilisations contre le colonialisme, avec des personnes célèbres comme Mark Twain ou Conan Doyle. Une longue fresque historique qui interroge sur un système d’accumulation de la richesse qui a besoin d’avoir toujours des esclaves pour faire l’essentiel du travail. Une écriture qui aborde avec humour et virtuosité les pages les plus horribles de l’histoire humaine.
Voici un extrait :
"Qui n’a pas entendu dire que le bilan de la colonisation était ‘plutôt positif’ ?
— Ah oui, le bilan comptable des sociétés ! répond Thomas Sankara.
— Qui n’a jamais entendu dire que ‘l’on’ avait tout de même construit des dispensaires, des routes, des écoles ?’ Comme si les ‘indigènes’ n’avaient pas édifié ces bricoles à la sueur de leur front.
— Des dispensaires pour éradiquer la variole qu’ils nous ont refilé, précise Lumumba.
— Des chemins de fer pour transporter leurs marchandises, ajoute Marien Ngouabi.
— Des écoles pour apprendre leur langue, ironise Félix Moumié"
Un livre très contemporain pour aborder des questions essentielles… car malheureusement, sous des formes différentes, la colonisation, le pillage de l’Afrique, le racisme, sont toujours d’actualité.
Éd. Albin Michel, 2022, 700 p., 25 €
Notre royaume n’est pas de ce monde Jennifer Richard
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