Le monde du travail est devenu synonyme de compétition entre les entreprises et, à l’intérieur de celles-ci, d’un rapport de prédation à la société et au monde vivant. La perte de sens, le sentiment de ne pas avoir les moyens de faire son travail du fait d’effectifs comprimés, la souffrance qui en résulte sont devenues tristement banales.
Mais ce tableau ne correspond qu’à une version, la pire d’entre elles, de ce que peut être le travail en tant qu’activité productrice de biens ou de services. Il est temps de rompre avec l’imaginaire du travail comme activité antisociale et de renouer le fil d’une tradition ancienne qui en fait un haut lieu d’expérimentation démocratique au service du bien commun.
Dans les structures coopératives qui sont présentées dans ce dossier, on explore d’autres modèles et d’autres rapports au travail, à la société, au vivant. Ici, on ne distribue pas de dividendes, on ne travaille pas pour des actionnaires.
Selon les lieux, on expérimente une diminution choisie du temps de travail, une réduction des écarts salariaux, des modes d’exercice du pouvoir horizontaux ou autogérés, des formes d’entraide à l’intérieur comme avec l’extérieur, une attention à ne pas détruire le vivant. Le sens et la qualité du travail en sont transformé·es.
Autant d’expériences concrètes qui permettent dès aujourd’hui de transformer les vies et l’économie, en attendant de muter vers un monde où le travail ne soit plus nécessairement lié à un salaire, à la survie monétaire et à l’échange marchand.
Guillaume Gamblin