Sous couvert d’innovations et de plan de relance 2030, sa version 2.0, incarnée par sa pâle copie Emmanuel Macron, a ainsi annoncé vouloir engager notre pays dans une nouvelle impasse nucléaire. L’histoire hoquette, diront certain·es. Jusqu’à la caricature et la nausée ajouteront d’autres ! Dans tous les cas, le comique de répétition ne fait plus guère recette.
Un entêtement nucléaire d’une autre époque
Alors même que l’urgence climatique imprime sa marque et nous oblige à agir avec célérité, le chef de l’État investit dans une technologie qui ne peut se révéler qu’un pari aléatoire produisant un éventuel effet dans 15 ou 20 ans. Le même genre de pari engagé il y a près de 20 ans pour l’EPR, 30 ans pour Iter ou 50 ans pour Superphenix. Avec à la clef, déconvenue, gaspillage de ressource financière et temps perdu.
Cette stratégie maintes fois réaffirmée d’une nation dont sa grandeur ne pourrait être acquise qu’à la seule condition de s’appuyer sur la technologie nucléaire est avant tout la marque d’un manque criant d’imagination, d’une cécité hors pair et surtout la preuve irréfutable que le lobby nucléaire et le monde politique sont les deux faces d’une même pièce.
Alors même qu’à peine une trentaine de pays recourt au nucléaire pour produire une partie de leur électricité, que la très prudente Agence Internationale de l’Energie estime qu’en 2030, moins de 3% de l’énergie finale consommée sera issue de l’atome, la France s’entête. Pire, notre pays n’est pas encore sorti de son dernier pari perdu avec l’EPR qu’un joueur de poker, recyclé pour l’occasion en chef de l’État, nous engage dans un nouveau jeu à plusieurs milliards d’euros.
L’atomobile est une illusion dangereuse
D’autant que ce pari est supposément justifié par l’arrivée de la voiture électrique, qui nécessiterait de nouvelles capacités de production électronucléaire. C’est faire bien peu de cas d’une note commise par ERDF intitulée « problématique de gestion de pointe du distributeur pour la recharge des véhicules électriques ». Cette note affirme tout de go que « pour 2 millions de véhicules, l’appel de puissance peut dépasser 10% de la puissance de pointe nationale, tandis que la consommation d’électricité sera de l’ordre de 1% du total ». Dit autrement, le nucléaire n’étant pas en capacité à répondre à la demande de pointe, la recharge d’une voiture électrique en période de pointe se fera essentiellement grâce à de l’hydraulique et du charbon allemand… L’atomobile sera tout à la fois radioactive et climaticide.
Pendant ce temps, notre cocotte-minute planétaire surchauffe. Le gaspillage énergétique est une norme non-écrite et rien ni personne ne semble prêt à adopter des réglementations contraignantes pour réduire notre empreinte énergétique. Des passoires thermiques aux SUV, des publicités énergivores aux extensions d’aéroports et autres contournements routiers, la France fourmille pourtant de projets qui mériteraient d’être revisités ou abandonnés afin de prioriser enfin la sobriété énergétique.
Mais notre Pompidou 2.0 préfère produire plus pour gaspiller plus. Économiser l’énergie nous entraînerait en effet sur les chemins hasardeux de la décroissance, inconcevable pour l’enfant caché des trente glorieuses.
Une campagne présidentielle s’engage. Espérons qu’elle permettra enfin d’engager le débat énergétique que notre pays n’a jamais réellement eu.
Stéphen Kerckhove