Une étude monumentale (764 pages), mondiale et magistrale, des inégalités économiques et sociales à travers les âges. Claire et captivante, elle défend en revanche une thèse contre-intuitive et portant peu à l’optimisme. Tout d’abord, loin de s’opposer, le développement des civilisations (ou simplement de conditions de vie permettant un peu de surplus de ressources) et celui des inégalités vont toujours ensemble. D’autre part, seules des ruptures violentes permettent de les limiter pour un temps. La métaphore des Quatre Cavaliers de l’Apocalypse permet de désigner ces processus niveleurs : les guerres totales (1914-1945), les pandémies (Grande Peste), les révolutions sanglantes (française ou soviétique), les effondrements d’États (l’Empire romain d’Occident ou la chute de la dynastie Tang dans la Chine médiévale). Dans ces circonstances mortifères uniquement, les hiérarchies sont renversées, des programmes politiques radicaux peuvent aboutir. Mais rappelons, avec l’auteur, que « histoire n’écrit pas l’avenir. »
Traduction par Cédric Weis, préface de Louis Chauvel, éd. Actes Sud, 2021, 764 p., 28 €