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La photographie pour changer nos imaginaires

Anne-Sophie Clémençon, Martha Gilson

Une revue se compose d’articles… et d’images. Depuis plus de 20 ans, Anne-Sophie Clémençon illustre de nombreux reportages publiés dans nos pages. Entretien avec une photographe des alternatives.

Si reportages écrits et textes d’analyses se comprennent en eux-mêmes, les images sont porteuses de leur propre langage et permettent de dire autre chose, d’éveiller un imaginaire qui dépasse celui des mots et par là de renouveler la vision que nous avons des alternatives.

Silence et l’image

Silence est une revue faite de mots et d’images. Si les tous premiers numéros sont denses et peu illustrés, la place de l’image a évolué au cours des années. « La mise en place du comité image, les nouvelles maquettes, faire les portraits de la nébuleuse Silence, l’idée des régionaux avec trois portraits sous l’image forte, etc », pour Anne-Sophie, ce sont autant d’étapes de prise en compte de la photo dans Silence. Le comité image, composé de salarié·es, de bénévoles et du maquettiste, discute chaque mois des prochaines couvertures de la revue. C’est le seul espace où est réellement posé collectivement la question des images : qu’est-ce qu’on veut montrer ?

Photographier les lieux ou les gens ?

Photographe d’architecture, le travail avec Silence l’a incité à sortir de sa zone de confort en la poussant vers les alternatives. Mais que montrer de celles-ci ? Pour Anne-Sophie, « il ne s’agit pas tant de tout montrer que de proposer une approche sensible de ces lieux et des personnes qui y vivent ou les ont conçus. On est à la jonction entre la photo documentaire et la photo plasticienne. Cette dernière peut parfois sembler abstraite, mais elle révèle souvent davantage sur les modes de vies qu’une photo classique. Je pense que les lieux racontent les histoires humaines davantage que la représentation de ces humains. Cela ne m’empêche pas de placer, aux côtés des photos de ces espaces, des portraits, car il est important de montrer les visages de ces inventeurs et inventrices d’un monde nouveau ». Les photos de repas partagés ou de carottes épluchées abondent dan la presse alternative et leur banalité peut aussi masquer l’originalité d’un lieu ou d’une ambiance.
En dehors de ces considérations esthétiques, privilégier des photos de lieux relève parfois de l’obligation, car il n’est pas rare que les personnes refusent de se faire photographier, ne souhaitant pas être associées à une occupation illégale par exemple.

Les alternatives : un vrai thème photographique

« Cette collaboration avec Silence m’a permis aussi de réaliser que le thème des alternatives est un vrai thème photographique et non pas quelque chose de marginal : montrer le visage des gens, ce qu’ils font, le collectif et surtout faire parler les espaces. C’est d’ailleurs plus qu’un thème photographique, c’est une nécessité politique. Mettre en lumière de grands récits sur l’écologie et les alternatives et donner à ces récits des images fortes est indispensable ».
Ce qui intéresse Anne-Sophie, c’est la question de l’utopie : « si tu n’as pas d’images fortes à associer aux utopies, ça ne marche pas. On a des images stéréotypées des alternatives, j’ai donc voulu montrer des images multiples et variées de chacune des utopies ».

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