Chronique Alternatives

Vers une sécurité sociale de l’alimentation ?

La Sécu telle qu’on l’a connue par le passé est en danger de disparition ? Plutôt que de se contenter de la défendre, un collectif d’organisations nourrit l’idée ambitieuse d’étendre au contraire son périmètre d’action à l’alimentation et à la production agricole. Appliquer réellement le droit de chacun·e à accéder à une alimentation choisie, reprendre la main collectivement et démocratiquement sur la demande alimentaire, mieux reconnaître et valoriser le travail agricole... Ces multiples nécessités ont fait émerger le projet de créer une sécurité sociale de l’alimentation.

Financée non par l’impôt mais par une cotisation sur la valeur ajoutée qui alimenterait son budget de façon indépendante de l’État, elle permettrait d’allouer à chaque personne une somme chaque mois. « Nous proposons que chaque habitant∙e dispose d’un budget de 150 € par mois pour se procurer des denrées alimentaires produites selon des critères de production décidés démocratiquement auprès d’une assemblée de citoyen·nes. Cette assemblée définira des critères qui s’appliqueront à l’ensemble des caisses pour les enjeux nationaux. Des critères locaux seront également déterminés par les caisses locales. Les caisses locales décideront aussi des agricult·rices qu’elles conventionneront », détaille Louise Seconda, d’Ingénieurs sans frontières. Des caisses gérées démocratiquement et localement, décideraient des produits accessibles avec l’argent distribué : produits frais mais aussi transformés ou accès à la restauration collective publique. 
Cette mesure permettrait notamment aux foyers les plus modestes de sanctuariser un budget pour l’alimentation sans avoir à le rogner pour garder un peu d’argent pour d’autres nécessités ou plaisirs. Le conventionnement irait de pair avec un engagement pour une transition dans le système de production. Le système permettrait au passage de sortir de certaines dérives de l’aide alimentaire, essentiellement industrielle, actuellement défiscalisée pour les géants de la distribution lesquels en tirent des gains sans remettre en cause le gaspillage. 
Ce projet complexe et ambitieux apporte une perspective stimulante et a le mérite de porter un projet de société large au-delà d’un empilement de mesures liées à des nécessités variées (soutenir l’agriculture paysanne, sortir des pesticides, combattre la précarité alimentaire, etc.). Il pose également de nombreuses questions : quelle incitation à des modes de production agroécologiques ? Quelle régulation des prix alimentaires ? Quel risque d’une dépendance accrue à l’État (comme pour le revenu universel) ? Bref,une proposition qui donne envie de creuser 
Elle est portée par un collectif constitué d’Ingénieurs sans frontières Agrista, Réseau Salariat, Réseau Civam, la Confédération paysanne, le Miramap, le Collectif Démocratie Alimentaire, les Ami∙es de la Confédération paysanne et l’Ardeur. Site internet du collectif : https://securite-sociale-alimentation.org. Ingénieurs sans frontières, 146 rue de Crimée, 75019 Paris, tél. : 01 53 35 05 40, www.isf-france.org. Voir aussi le dossier que consacre à ce projet Campagnes Solidaires, le mensuel de la Confédération Paysanne, n°364, septembre 2020. Campagnes Solidaires, 104 rue Robespierre, 93170 Bagnolet, http://confederationpaysanne.fr. 

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