On sait déjà que le vélo est bon pour la santé. Mais avec l’obligation de rester à distance, pour éviter la propagation du coronavirus, on découvre aussi qu’il permet une juste distanciation. Alors que la question des transports redevient un sérieux problème après la période de confinement (soit l’entassement dans les transports en commun avec un masque qui ne protégera pas assez, soit le retour des embouteillages), le vélo apparaît comme une excellente solution. De nombreuses communes se sont lancées dans l’ouverture de nouvelles pistes cyclables et offrent des aides pour l’achat d’un vélo ou d’un vélo électrique. Ce dernier, en permettant de se déplacer avec moins d’effort et sur des distances plus longues et plus accidentées, rencontre un succès impressionnant, les ventes explosant depuis le mois de mai 2020 (elles étaient déjà en hausse avant avec +12 % en 2019).
En finir avec les bandes cyclables
Encore faut-il que l’on adapte la façon de faire les pistes cyclables à l’affluence des cyclistes. Il faut en finir avec les simples bandes cyclables coincées entre les places de stationnement (avec le risque de se prendre une portière qui s’ouvre) et la circulation (avec des voitures qui vous frôlent, parfois à contre-sens).
Nous avons l’exemple des grandes villes du Nord de l’Europe pour nous montrer la voie (cyclable) à suivre : il faut faire des pistes unidirectionnelles à deux voies, nettement séparées de la circulation automobile, et ceci de part et d’autres de la circulation motorisée. Chaque piste occupe sur chaque bord de la rue l’équivalent d’une file de voiture (soit qui roule, soit qui stationne). Lorsque les rues sont trop étroites, celles-ci doivent être fermées à la circulation (avec des horaires pour le passage des camions de livraison et l’accès aux garages). Ces rues deviennent piétonnes et cyclables.
Gagner de la place pour végétaliser la ville
Nous pourrions penser que nous manquerons alors de place pour que tout le monde se déplace. Mais le vélo nécessite pour se mouvoir cinq fois moins de place par personne que la voiture. Et c’est encore mieux à l’arrêt : on peut stationner entre 6 et 8 vélos sur une seule place de stationnement de voiture… Plus le taux de remplacement des voitures par les vélos augmente et plus cela libère de la place dans l’espace public, pour des espaces verts, des plantations d’arbres (fruitiers) et plus la pollution atmosphérique baisse.
Bien différencier les zones piétonnes des zones cyclistes
Le vélo ne doit plus être considéré seulement comme un véhicule de loisir. Ce qui suppose que là où il roule, il doit pouvoir rouler à une certaine vitesse, ce qui exclut les zones mixtes piétons cyclistes, extrêmement stressantes pour les un·es comme pour les autres. Ces zones ont été pensées par des personnes qui considèrent que le vélo ne sert qu’à flâner.
Actuellement, la vitesse d’aide des moteurs électriques sur les vélos est plafonnée sur les pistes cyclables à 25 km/h. Cette vitesse est largement suffisante pour les déplacements en ville et devrait être la norme pour toutes les rues.
Suivre l’exemple de Copenhague
Ceci n’est pas un délire de cycliste. C’est seulement une proposition de rattrapage de ce qui se passe dans de grandes villes comme Copenhague, première ville où la circulation cycliste a dépassé en nombre de véhicules la circulation motorisée. Aujourd’hui, il y a 672 000 bicyclettes dans la capitale danoise, cinq fois plus que de voitures. La plupart des pistes cyclables sont séparées de la circulation automobile, la mairie ayant constaté que c’est la condition pour que les gens qui ne sont pas des cyclistes militant·es, acceptent de monter sur une selle. Le sentiment de sécurité est important, ce qui explique que pratiquement personne ne porte de casque.
Cela a aussi eu comme conséquence qu’il a fallu mettre au point des méthodes spécifiques pour gérer les flux de cyclistes. Ainsi, si vous voulez vous arrêter, il faut lever le bras haut au-dessus de vous pour alerter ceux et celles qui vous suivent. Il y a des espaces prévus dans les carrefours qui permettent de tourner à gauche (1).
Les pistes sont unidirectionnelles à double voie, ce qui permet le dépassement des moins rapides, y compris lorsqu’il s’agit d’imposants vélos-cargos utilisés pour le transport des marchandises.
Chaque jour, ce sont 1,5 millions de km qui sont parcourus à vélo dans la capitale danoise.
La situation est sensiblement la même à Amsterdam et dans d’autres villes danoises, néerlandaises, suédoises ou encore allemandes.
Modifier l’apprentissage de la route
La Sécurité routière continue d’apprendre le code de la route aux enfants avec des circuits routiers miniatures… représentant de simples routes. Il serait temps d’y faire figurer les trottoirs pour les piétons, les pistes cyclables… et d’apprendre que l’on ne doit dépasser un vélo que lorsque l’on dispose de l’espace suffisant (soit en laissant plus d’1 m en ville, plus d’1,50 m hors ville).
L’obtention d’un permis de conduite pour les voitures ou les motos pourrait être conditionné à l’obtention d’un permis vélo. Afin que le ou la candidate ait conscience qu’elle n’est pas obligé·e d’opter pour un véhicule d’une ou deux tonnes.
Francis Vergier
(1) Pour cela, on s’engage dans le carrefour, on fait un demi-tour dans le sas à sa droite pour se retrouver dans le sens de circulation et on repart dans la voie cyclable perpendiculaire lorsque les feux ont changé.