Chronique L’écologie c’est la santé Santé

Abeilles : faire le choix de la vie

L’abeille est un animal à part. Son image est sans doute une des plus positives parmi tous les animaux. Sa production de miel contribue sans doute à cette popularité. Mais ce sont les services énormes qu’elle rend à la production alimentaire grâce à la pollinisation qu’elle effectue –aux côtés des autres pollinisateurs- qui lui confèrent une position unique puisqu’on estime l’apport des insectes pollinisateurs, dont l’abeille, aux principales cultures mondiales à 153 milliards d’euros, soit 9,5 %de la production alimentaire mondiale (1). Ce n’est donc pas pour rien qu’en 2008 les abeilles ont été proclamées « espèce animale la plus importante et la plus précieuse de la planète », rien de moins (2) !

Déclarations d’amour mais décisions mortelles

Pourtant, au-delà de ces véritables déclarations d’amour faites à l’abeille, des actes politiques majeurs récents vont…dans une direction radicalement opposée à leur protection ! C’est tout d’abord la volonté du gouvernement français de ré-autoriser les néonicotinoïdes – ces fameux insecticides « tueurs d’abeilles » – pour la culture des betteraves. Pourtant tous ces néonicotinoïdes avaient été interdits en France dès 2016. Mais, sous la pression du lobby des producteurs de betteraves, le gouvernement voudrait pouvoir de nouveau les utiliser alors que le pays était jusqu’à présent à la pointe de la lutte contre ces ‘tueurs d’abeilles’, les ayant tous interdit !
Au niveau européen aussi, ces fameux néonicotinoïdes reviennent par des dérogations après avoir été interdits. La Cour des comptes européenne regrette à ce sujet que « malgré le cadre de l’UE, des États membres utilisent encore des pesticides considérés comme responsables de la disparition massive d’abeilles mellifères. Ainsi, au cours de la période 2013-2019, 206 autorisations d’urgence ont été octroyées pour l’usage de trois néonicotinoïdes (l’imidaclopride, le thiaméthoxame et la clothianidine) […] dont l’utilisation en extérieur est strictement interdite depuis 2018 ». (3)
Plus largement, les règles gouvernant l’évaluation des risques des pesticides pour les abeilles en Europe, appelées Bee guidance ne semblent pas évoluer dans le bon sens. Ainsi, la Bee guidance rédigée en 2013 par l’Agence de sécurité sanitaire européenne (EFSA) n’a jamais été appliquée car les états membres l’ont rejetée, sans doute parce qu’elle était trop protectrice pour les abeilles…et trop sévère pour l’industrie des pesticides ! Aujourd’hui une nouvelle Bee guidance est proposée, beaucoup moins protectrice pour nos chères abeilles !
Si nous voulons réellement protéger nos abeilles, et tous les autres pollinisateurs, il faudra pourtant une bonne fois pour toutes sortir de ce comportement ambivalent – le fameux ‘en même temps’ – pour faire le choix nécessaire de la biodiversité, de la vie… et des abeilles !

(1) « Les abeilles, maillon essentiel de la biodiversité », 2 juin 2012, https://agriculture.gouv.fr.
(2) « Why bees are the most invaluable species », 21 novembre 2008, The Guardian.
(3) Cf. le communiqué de la Cour des comptes européenne du 9 juillet 2020.

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