Être écoféministe. Théories et pratiques de Jeanne Burgart Goutal

L’écoféminisme est un mouvement d’une telle diversité qu’il est difficile à cerner. Cette « nébuleuse » regroupe des approches théoriques parfois très conflictuelles les unes envers les autres, et des pratiques plus diverses encore. C’est dans cet enchevêtrement inextricable que l’autrice s’est plongée durant plusieurs années, par des lectures, des rencontres, des expériences. Son enquête à la fois philosophique et de terrain nous plonge dans une exploration humble et éclairante. Commençant par nous promener dans la diversité de ses courants et leur « impossible cartographie », elle propose ensuite une approche historique qui aide à mieux comprendre. Avant de tirer certains fils qui unissent ces approches écoféministes : interdépendance de tous les systèmes de domination (patriarcal, anthropocentriste, colonialiste, classiste, raciste, etc.) qui ne peuvent être combattus qu’ensemble, nécessaire dépassement de la dualité fondant notre regard occidental sur la nature, féminin réinventé, puissant et généreux, etc. Bien plus qu’une addition du féminisme et de l’écologie, l’écoféminisme c’est « percevoir les racines entrelacées de la misogynie et de la haine de la nature » (Ynestra King) et créer les moyens de les dépasser d’un même mouvement. L’autrice nous fait également partager, sans se départir de son esprit critique, ses rencontres avec des actrices très diverses de cet univers, de Sylvie Barbe qui vit la radicalité de ses idéaux écoféministes au milieu de la forêt, à Navdanya, l’ONG de Vandana Shiva. Elle nous fait toucher à quel point l’écoféminisme englobe une diversité de réalités qui défie toute réduction théorique. On ne peut que conseiller de se plonger dans cette enquête à la fois intelligente, sensible et d’une rare subtilité.
Éd. L’échappée, 2020, 320 p., 20 €