Le capitalisme, pour continuer à concentrer la richesse dans quelques mains, a besoin d’une croissance continue de nos échanges monétaires. Face à cela, de nombreux penseurs, à commencer par Ivan Illich, ont mis en avant la nécessité de redévelopper l’autonomie (ce que l’on peut faire soi-même face au système, qualifié d’hétéronome), la convivialité, l’entraide, la coopération. Mais par où commencer ? Comment éviter de se lancer dans des alternatives qui restent confinées dans leur domaine, avec un faible impact politique ?
En 1983, Hans Widmer, jeune enseignant suisse, auteur de science-fiction, publie le manifeste Bolo’bolo. En partant du constat qu’une majorité de la population vit en milieu urbain, il propose de penser les alternatives en liant îlot urbain (bolo) et agriculture vivrière. Le livre suscite des débats et contribue à la création de la coopérative d’habitants Kraftwerk-1 qui, aujourd’hui, compte trois ensembles d’immeubles à Zurich (Suisse).
Autour de ces logements, l’idée est de développer des alternatives dans les domaines écologiques et sociaux, afin de diminuer la dépendance à l’argent, faciliter la réduction du temps de travail salarié, et, progressivement, d’essaimer dans le monde entier, en se structurant à différents niveaux territoriaux selon une logique antihiérarchique.
En 2016, Hans Widmer publie un nouveau manifeste en lien avec le mouvement Redémarrer la Suisse (1). Il montre encore une fois l’intérêt de développer des liens de voisinage forts pour favoriser l’autonomie, reconquérir les communs (ce qui appartient à tous) et continue à prôner la création de « bolo » tout en s’interrogeant sur l’apathie des personnes de la classe moyenne, conscientes de l’impasse actuelle et pourtant engoncées dans le confort consumériste.
Nous vous présentons dans ce numéro l’expérience de Kraftwerk, les réflexions actuelles d’Hans Widmer, les projets en courts… De quoi enrichir notre approche de l’habitat groupé en France.
Michel Bernard