Nous nous inquiétons d’un possible effondrement. En fait celui-ci est déjà présent, non pas dans les pays riches, mais dans les pays du Sud où nous avons externalisé tout ce qui pose problème chez nous : extraction des minéraux, travail avilissant, entassement des déchets… Ce phénomène ne date pas d’aujourd’hui : la conquête de nouvelles terres dès le 16e siècle a permis d’accumuler des richesses, cela s’est poursuivi avec la période coloniale, le développement de la société industrielle et cela continue de s’amplifier malgré l’apparente indépendance des pays du Sud.
Aujourd’hui, la situation est tellement dégradée sur le plan social et environnemental dans ces pays dit « en développement » que nous commençons à craindre que cela nous éclabousse. D’autant que certains phénomènes deviennent planétaires : c’est le cas lorsque nous subissons les tempêtes liées au réchauffement climatique, lorsque nous importons de la nourriture polluée aux pesticides, etc.
Notre société actuelle et son confort reposent sur l’échange inégal. Plutôt que de parler argent, l’auteur suggère de regarder l’espérance de vie qui est une bonne traduction du niveau d’exploitation de chacun des pays. Si des humains vivent moins longtemps que nous, c’est parce que leur environnement est dégradé, leurs conditions de (sur)vie difficiles, les services d’aides, de santé, détruits au nom des ajustements structurels imposés par les milieux bancaires. « Des humains sont tués [pour que] les gens vivant dans les centres de prospérité [puissent] maintenir notre niveau de vie, nos opportunités, nos habitudes de consommation » (p.194). Les relations entre les deux mondes sont une perméabilité sélective : le Nord peut aller dans le Sud, non l’inverse.
Cette situation (la mondialisation) s’est construite progressivement, les dirigeants ont su rendre la situation apparemment « normale ». Ce fonctionnement est présenté comme « évident ». « La violence structurelle agit de façon à peine perceptible, elle opère en tant que contrainte silencieuse et échappe à l’observation telles des eaux dormantes » (p.202). « Nous ne vivons pas au-dessus de nos moyens, nous vivons au-dessus des moyens des autres » (p.212).
Les exemples concrets et les analyses sont pertinentes, même si on peut regretter que l’auteur ne propose pas de solution. MB
Traduction de l’allemand Raymond Roy, éd. Ecosociété, 2019, 230 p., 18 €
À côté de nous le déluge La société d’externalisation et son prix de Stephan Lessenich
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