Enquête dans une usine Mattel
Le géant Mattel possède plusieurs unités de production en Chine, dont l’usine de Foshan dans le Guangdong. Au cours de l’été 2019, une jeune femme s’est fait embaucher dans l’usine pour recueillir des informations de première main sur les conditions de travail dans cette usine.
Cette enquêtrice du China Labor Watch, une ONG créée aux États-Unis par un ancien ouvrier chinois exilé, nous a permis de constater quelques progrès depuis nos premières campagnes de solidarité avec les ouvrières et les ouvriers du groupe Mattel, il y a 20 ans… mais les cadences continuent d’augmenter, les salaires ne suivent pas, et les ouvrières sont nombreuses à subir des situations qui s’apparentent à du harcèlement sexuel.
Quelques voix commencent à s’élever
Malheureusement, le « laisser-faire » qui règne dans l’usine Mattel de Foshan semble de mise dans de nombreuses usines chinoises. Ainsi, une étude menée par le Sunflower Women Workers Centre en 2013 révélait que 70 % des ouvrières d’usine avaient déjà été victimes de harcèlement sexuel dans la ville de Guangzhou, voisine de Foshan.
Dans une lettre publique datée de janvier 2018, une ouvrière de Foxconn, une grande usine d’électronique en Chine, a courageusement dénoncé le phénomène : « Raconter à haute voix des blagues cochonnes, ridiculiser des collègues féminines à propos de leur apparence et de leur silhouette, utiliser l’excuse de ’donner des directives’ pour établir des contacts corporels inutiles... dans les ateliers, ce genre de comportement est répandu ».
Alors, que faire ?
La « hotline » mise en place par Mattel ne peut pas suffire. Sur place, aucune des ouvrières ayant témoigné auprès de notre enquêtrice ne l’a utilisée. Elles ne savaient pas à quoi servait le numéro indiqué sur leur carte, craignaient que leur anonymat ne soit pas respecté ou considéraient qu’y faire appel ne réglerait rien.
C’est pourquoi nous demandons à la marque de prendre de vraies mesures contre le harcèlement sexuel dans ses usines.
Dans ce domaine, les géants du jouet seraient bien inspirés de conclure un accord avec les usines qui les fournissent, sur le modèle de l’accord signé le 28 août 2019 au Lésotho entre 5 syndicats et 4 marques textiles. Cet accord, dont le non-respect pourrait entraîner la suspension des commandes auprès des usines concernées, prévoit non seulement un dispositif d’alerte en cas de harcèlement sexuel, mais aussi un programme de sensibilisation et de prévention des violences. Sa mise en œuvre sera contrôlée par les travailleurs et les travailleuses elles-mêmes.