Chronique Chronique Désarmons ! Paix et non-violence

C’est quoi la paix ?

Patrice Bouveret

Est-il possible de mesurer la paix et son évolution ? C’est ce à quoi s’essaye l’Institut pour l’économie et la paix avec l’« indice mondial de la paix » (GPI).

Pour établir leur classement — dont c’est la 13e édition — les auteur·es s’appuient sur 23 indicateurs qualitatifs et quantitatifs ayant une incidence sur le développement de sociétés pacifiques. Ainsi sont examinés non seulement les dépenses militaires, le nombre de militaires, les importations et exportations d’armes, l’implication dans les guerres, mais également le niveau de violence et de délinquance interne au pays.
Parmi les faits marquants du GPI 2019 :
- les conflits au Moyen-Orient ont été le principal moteur de la détérioration de la paix dans le monde ;
- 104 pays ont enregistré une augmentation des activités terroristes contre seulement 38 qui ont connu une diminution ; cependant, le nombre de décès dus au terrorisme est en baisse dans le monde depuis 2014 ;
- le nombre total de morts lors de conflits a augmenté de 140 % depuis 2008 ;
- le nombre de membres des forces armées pour 100 000 habitants a diminué dans 117 pays et les dépenses militaires en pourcentage du PIB ont diminué dans 98 pays, alors qu’elles ont augmenté dans 63 pays…

Un classement des pays les « plus pacifiques » qui pose question

Disons-le tout de suite, la France, classée 60e sur les 163 États analysés, ne figure pas en pôle position. Elle se retrouve à l’avant dernière place des pays de l’Union européenne, juste devant la Grèce. Le trio de tête du GPI est l’Islande (depuis 2008), la Nouvelle-Zélande et le Portugal. L’Afghanistan, la Syrie, le Soudan du Sud, le Yémen et l’Irak font partie — sans trop de surprises — des cinq pays les moins pacifiques. Toutefois, le classement de certains pays surprend, par exemple, les Émirats arabes unis se retrouvent à la 53e place alors qu’ils sont tout autant impliqués dans la guerre au Yémen aux côtés de l’Arabie saoudite située elle à la 129e place, juste d’ailleurs après les États-Unis…
Les auteur·es de l’indice estiment que le niveau moyen de paix dans le monde « s’est très légèrement amélioré » pour la première fois depuis cinq ans, avec 86 pays en amélioration et 76 en détérioration. Une analyse qui paraît à contre-courant, d’une part, de la perception des risques de guerre, de la relance de la course aux armements, bref de cette insécurité globale, violente, que les médias nous décrivent ; et, d’autre part, des causes des conflits…
Car, selon les auteurs, il existerait une forte corrélation entre l’évolution de l’indice de paix et la croissance du PIB… Ce qui signifierait que la paix progresse seulement par le développement économique. Or, nous savons que celui-ci est contraint et que le pillage de la planète qui en résulte est en lui-même source de conflits… Le développement économique de nos pays en « paix » sur leurs territoires repose en partie sur leurs exportations d’armes à des pays en guerre. Ne sommes-nous pas face à une contradiction majeure ?
Patrice Bouveret

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