La décroissance, ce « mot obus » qui vise à ébranler l’hégémonie de la croissance économique, a fait son entrée dans le paysage des idées et des luttes en 2002 en France, après quelques discrètes apparitions.
Depuis, « les idées de la décroissance infusent la société en silence », estime Vincent Liegey, membre du Parti pour la décroissance.
Le succès de certaines pratiques de relocalisation avec les Amap, de recyclage avec l’essor des composts, du « faire par soi-même » avec les ateliers de réparation, etc., en sont des signes. Impossible de manger de la viande ou de prendre l’avion sans avoir en tête la réflexion sur notre empreinte écologique.
Un certain nombre de médias indépendants se sont créés pour porter la réflexion sur ce sujet : Moins ! en Suisse, Kairos en Belgique, La Décroissance en France, ont rejoint Silence, précurseur dans le domaine (1).
Parallèlement, la décroissance n’est plus un sujet tabou sur le plan politique. Après avoir été confrontée à des réactions de mépris, puis de moquerie et d’agressivité, elle est de plus en plus prise au sérieux.
La promotion du revenu universel par le candidat socialiste Benoît Hamon en 2017, le discours de François Ruffin à l’Assemblée nationale le 26 septembre 2018 (« Votre croissance, nous n’en voulons pas ! ») (2), ou encore la conférence sur la décroissance en septembre 2018 au Parlement européen en témoignent.
En décembre de la même année, le journal Le Monde consacrait à la décroissance un dossier de six pages, étalé sur 3 jours. Quant aux recherches universitaires dans le domaine, elles ont explosé.
Cet essor des intuitions de la décroissance reste cependant peu visible car il n’a pas été porté par une dynamique militante très lisible. Au niveau français, des tentatives de reconnexion des diverses chapelles décroissantes se font jour pas à pas, au sein de la Maison commune de la décroissance (3) par exemple, ou en s’appuyant sur l’échelle locale comme à Lyon.
Où en est-on aujourd’hui ? Quels sont les dynamiques et les débats qui animent les réseaux décroissants ?
Du local au global, des pratiques quotidiennes à la recherche universitaire, Silence vous invite à un petit tour, à dos d’escargot, dans les paysages actuels de la décroissance.
Guillaume Gamblin
(1) Silence a publié son premier article sur le sujet en 1989 et son premier dossier sur la décroissance en 1993.
(2) Voir « Votre croissance, nous n’en voulons pas ! » sur francoisruffin.fr
(3) Voir l’article « La Maison commune de la décroissance » dans Silence de l’été 2017, no 469, p. 46.