Le principe de base de l’action non violente est la non-collaboration avec l’injustice. En ce sens la grève représente une action non violente visant à créer un rapport de force pour obtenir satisfaction : les ouvri·ères refusant de travailler, l’entreprise ne produit plus et l’actionnaire perd de l’argent. L’équation entre le manque « à gagner » par l’arrêt de la production et la perte de profits si le coût de production augmente est au cœur de l’action syndicale.
Le mouvement ouvrier a utilisé la grève en réaction à des conditions de travail jugées inacceptables.
La grève s’apparente à une action de désobéissance civile lorsqu’elle est interdite. En France, il faudra attendre le 19e siècle pour obtenir le « droit de grève ». Les fonctionnaires attendront 1944 pour obtenir le droit de grève.
La grève non violente
Une grève est non violente s’il n’y a pas d’atteinte à des personnes. Mais souvent, des violences ont lieu : la répression policière (ou militaire, en particulier celle dans les mines du Nord en 1948 qui a fait plusieurs morts et des milliers de blessé·es) peut être féroce. Si la grève consiste, au départ, à ne pas se rendre à son poste de travail, face aux travailleuses et travailleurs « jaunes » (non grévistes), des piquets de grève vont bloquer l’accès des usines. Des occupations de l’usine accentuent la pression. Selon les cas, l’image renvoyée par les médias apporte un soutien aux grévistes, ou au contraire les dessert. L’action non violente souhaite renvoyer l’image la plus acceptable possible par la recherche de soutiens extérieurs au mouvement.
L’occupation de l’usine de fabrication des montres LIP en 1973 donne une nouvelle version de la grève : la remise en route de la production par les ouvri·ères en autogestion. Cela permet de continuer à payer des salaires sans fournir d’argent aux actionnaires et au patron, mais montre aussi que les usines peuvent fonctionner sans patron·ne. C’est une orientation très politique de l’action.
Une organisation nécessaire ?
Si des grèves sont spontanées, rapidement le monde ouvrier s’organise en syndicat et fournit un « mode opératoire » : expression des revendications, annonce du démarrage de la grève, organisation d’une « caisse de solidarité » permettant de tenir plusieurs jours (ou mois), négociation avec les représentant·es du personnel, accord de fin de conflit.
Ce cadre traditionnel de la lutte des classes aboutit à une certaine sclérose de la vie sociale : les syndicats s’inscrivent dans le système et canalisent les revendications. De nouvelles actions de grève organisées par des comités d’action remettent en cause les modes institutionnels de régulation des conflits. L’action des gilets jaunes en est l’une des expressions les plus récentes : pas d’organisation, utilisation des réseaux sociaux aboutissant à une horizontalité et une décentralisation des décisions.
L’utilisation de la grève générale (tout un pays) va être l’expression d’une revendication politique : changement d’un gouvernement ou de décisions au niveau national.
Serge Perrin
Mouvement pour une Alternative Non-violente — Lyon