L’hélioroute normande, inaugurée par Ségolène Royal le 22 décembre 2016, a produit deux fois moins d’électricité que prévu durant l’année 2017. Elle a coûté 5 millions d’euros. L’hélioroute parisienne, installée à Boulogne, « manque de... soleil », a titré le journal Le Parisien le 26 juillet 2018. Elle devait chauffer la piscine. Les expert·es auraient découvert que les camions, voitures, motos, vélos et piétons qui passent sur la route font davantage d’ombre que prévu. Sans parler des salissures, qui font obstacle au passage de la lumière. Vincent Boulanger, spécialiste du solaire basé en Allemagne, a résumé ainsi la performance de ce projet : « Impressionnant ! 100 m2 de Wattway produit 7 kWh/jour, soit 2 500 kWh/an, soit 5 fois moins que 100 m2 photovoltaïques sur un toit ! ».
Le projet d’hélioroute en Ardèche a de son côté suscité la publication d’un communiqué cinglant de la part d’EELV-Ardèche. « L’électricité produite en photovoltaïque coûte aujourd’hui moins cher que l’électricité nucléaire. Mais si on voulait prouver que les énergies renouvelables coûtent trop cher, on ne s’y prendrait pas autrement qu’avec une telle route photovoltaïque (…). La route est l’un des pires endroits pour l’installation de cellules photovoltaïques (…). Le coût à l’installation est énorme et il ira à l’entreprise Colas, filière de Bouygues. C’est une très bonne manière de subventionner les grands groupes, sans retour pour les populations ».
Et en Vendée ? L’hélioroute installée juste devant le collège Saint- Exupéry, à Bellevigny, était morte au bout de 18 mois d’agonie physique. Une durée de vie aussi courte est vraiment rédhibitoire pour le taux de retour énergétique du système : il est fort probable que davantage d’énergie ait été consommée pour construire cette route solaire scolaire qu’elle n’a délivré d’énergie électrique durant les 18 mois en question.
Des routes solaires pédagogiques ?
En Picardie, Colas a installé durant l’été 2018 une route solaire au coeur même du collège Édouard-Lucas, à Amiens. Un investissement de 122 000 euros TTC (soit 5 083 € le mètre carré), assuré à 100 % par de l’argent public, pour une production estimée de 1 800 kWh par an. Même si ces 24 mètres carrés d’hélioroute de 10e génération s’avéraient capables de produire pendant 20 ans sans aucune dégradation de rendement, seulement 36 000 kWh seraient délivrés. Ce qui ferait un coût de 3,4 euros par kWh. Le coût du solaire standard est à présent de 0,052 €/kWh en France, ce qui est 65 fois moins élevé.
« La route solaire est un cas d’école, observe Olivier Appert, délégué général de l’Académie des technologies et ex-président du comité français du Conseil mondial de l’énergie. Rares sont les acteurs du secteur de l’énergie qui ont osé émettre publiquement un avis critique sur ce concept, qui est économiquement et énergétiquement absurde. Pour les établissements scolaires, un projet véritablement pédagogique serait d’inciter les élèves à avoir un comportement économe, ensuite d’isoler les bâtiments en privilégiant les approches rationnelles coût/bénéfice ».
Article initialement paru sur Reporterre : https://reporterre.net/