Dans les années 1980, les Kanak (terme invariable) se mobilisent pour l’indépendance. Les actions de désobéissance se multiplient. À la veille du premier tour des élections présidentielles de 1988, un groupe de militant·es investit une gendarmerie sur l’île d’Ouvéa. L’occupation dégénère. Un gendarme ouvre le feu provoquant une riposte : 4 gendarmes sont tués. Les autres gendarmes sont pris en otage par les Kanak qui se replient dans la forêt et se cachent dans une grotte réputée tabou. Après de longues négociations, l’assaut est donné par les militaires provoquant la mort de 21 personnes, dont 19 Kanak. Suite à cette crise majeure, des accords sont signés dans les mois qui suivent qui prévoient la tenue d’un référendum 30 ans plus tard… ce sera le 4 novembre 2018.
Joseph Andras va prendre le temps de rencontrer et d’écouter tous ceux et celles qui ont été proches d’Alphonse Dianou, l’un de ces militants. Alphonse Dianou, 28 ans, musicien, qui après avoir quitté le séminaire et renoncé à être prêtre, a défendu au sein des indépendantistes une posture non violente. Comment cet admirateur de Gandhi a pu se laisser entraîner dans une action qui est devenue extrêmement violente ?
Se rendant en Nouvelle-Calédonie, il alterne ces rencontres qu’il rapporte de manière très précise et dans un style littéraire très agréable avec le récit de ce qui se passe du côté des autorités, jour après jour, pendant les 13 jours qu’a duré la prise d’otages. Chaque journée est ponctuée par un compte à rebours, donnant un rythme dramatique au récit.
Il n’y a pas eu de procès : l’accord a prévu une amnistie générale bien pratique pour éviter de mettre au grand jour les exactions des militaires, beaucoup plus violents que les Kanak.
Un livre à lire avant le référendum pour se remémorer l’histoire du moment et comprendre que la démarche indépendantiste a peu de chance d’aboutir tant la France cherche à conserver ses confettis coloniaux un peu partout.
Éd. Actes Sud, 2018, 296 p., 21 €