Pendant le processus de demande d’asile, j’ai travaillé comme bénévole à la Croix-
Rouge Française à Lyon, et j’ai à cette occasion rencontré Claire Lejeune, de l’association Terre d’Ancrages, qui était volontaire également. Elle m’a parlé de Terre d’Ancrages et m’a proposé de les rejoindre pour rencontrer de nouvelles personnes, ne pas être seule. Des événements sont organisés, des repas, des ateliers, pour les personnes en cours de demande d’asile. Nous sommes devenus ami·es avec Claire et les autres membres de Terre d’Ancrages, et je n’ai ainsi jamais été seule. Elle m’a ensuite parlé du tour à vélo, c’était une occasion pour moi d’arriver à me situer en France. Car je vis à Lyon, mais ne savais pas vraiment me situer géographiquement sur une carte, je ne me représentais pas vraiment où est la France par rapport aux autres pays, où est Lyon en France. On m’a montré une carte, avec le point de départ, les villages par lesquels on allait passer, les étapes pour arriver à Paris. Ça m’a enthousiasmée, et j’ai décidé que je voulais absolument le faire.
Une expérience pour voir et toucher réellement le pays
Et ce n’était pas juste bien, c’était incroyable ! J’avaisdéjà une très bonne opinion des Français·es, mais là c’était encore mieux. On a très bien mangé, on a dormi dans des endroits confortables, et la sécurité était assurée, ce qui était important pour moi. C’était une très belle expérience de voir la France, les gens, de goûter les différentes spécialités culinaires, de découvrir la culture locale, les chants traditionnels, par exemple en Bourgogne. C’est une des choses incroyables que j’ai vécues, et que la population française ne connaît même pas ! C’est vraiment bien pour connaître le pays. Je n’avais rien à faire à part attendre la convocation de l’OFPRA [1], ça m’a fait du bien de faire du sport et de voir des gens, de côtoyer des Françaises et des Français, de découvrir le pays de l’intérieur. J’ai pu toucher le pays, littéralement, avec les pieds, avec mes doigts, le voir de mes propres yeux.
Claire et les autres personnes de l’association ne se rendent peut-être pas compte, ou n’imaginaient pas en créant ce tour à vélo, à quel point c’est bénéfique pour nous. On est sur un vélo pendant 11 jours, cela prouve qu’on a de la patience, de l’endurance, qu’on est un peu à l’épreuve du feu. Beaucoup d’ami·es à qui j’avais proposé de participer ont refusé, craignant que ce ne soit trop difficile. J’ai pu prouver que j’étais résistante physiquement.
Provoquer la rencontre
Et ça m’a permis de rencontrer des personnes qui n’avaient jamais vu d’Iranienne de leur vie. Ça a provoqué la rencontre, ça a changé l’image qu’elles avaient de mon pays et de sa population. Rencontrer une femme iranienne non voilée, habillée de façon colorée, à l’esprit ouvert, éduquée, diplômée, souriante, sportive, qui parle anglais, qui conduit, qui fait du vélo, etc. : cela va à l’encontre de ce que beaucoup imaginaient. Cela les bouscule dans leurs idées et vient en contrepoids de ce qu’ils entendent, voient, lisent sur l’Iran, les mauvaises nouvelles diffusées habituellement. Cela fait changer les mentalités, et c’est un changement positif.
S’il y a une prochaine édition je veux absolument y participer. Tout est fait pour que ce soit le plus facile possible, que l’on soit dans les meilleures conditions. En rentrant j’ai dit à ceux et celles qui s’étaient défilé·es qu’ils et elles avaient vraiment loupé quelque chose !