J’ai souvent parlé des perturbateurs endocriniens dans cette chronique. Pour celles et ceux qui n’auraient pas suivi : il s’agit de nombreuses substances chimiques ou métalliques agissant comme des hormones et ayant la capacité, même à de très faibles doses, de perturber notre système endocrinien. Quand c’est le foetus ou le nouveau-né qui sont exposés, alors des maladies chroniques lourdes comme le diabète, certains cancers, des troubles du spectre autistique… peuvent apparaître plus tard. Les coûts sanitaires des perturbateurs endocriniens sont considérables puisqu’ils sont évalués à plus de 150 milliards d’euros par an en Europe par l’Endocrine Society, la société savante internationale d’endocrinologie !
Reculade de la France au niveau européen…
Contre toute attente la France avait permis le 4 juillet 2017 l’adoption des critères scientifiques proposés par la Commission européenne permettant de définir les perturbateurs endocriniens dans le cadre du règlement européen sur les pesticides. Ces critères exigeaient pourtant un niveau de preuve trop élevé, qui ne permettait pas d’exclure toutes les substances le méritant. Par ailleurs le cadre adopté prévoyait une dérogation à l’interdiction pour des pesticides… justement conçus pour agir sur les insectes par l’intermédiaire de leur système endocrinien ! Un comble ! Générations Futures avait à l’époque dénoncé fortement ce renoncement de la France dans un dossier où notre pays avait pourtant été aux avant-postes ces années passées, sous la houlette d’une Ségolène Royal vent debout contre la proposition de la Commission européenne.
… mais des eurodéputé·es font de la résistance et gagnent une bataille !
Heureusement des eurodéputé·es socialistes et Verts ont décidé de se battre contre ces mauvais critères d’identification des perturbateurs endocriniens. Ils et elles ont alors déposé une objection car pour eux la Commission européenne avait outrepassé ses droits en proposant des dérogations importantes à l’interdiction des perturbateurs endocriniens alors même que l’objectif du Règlement sur les pesticides était… de faire disparaître les pesticides perturbateurs endocriniens du marché !
Nous partagions cette analyse, mais la tâche paraissait presque impossible. Pourtant, le 4 octobre 2017, tous les pronostics étaient déjoués et cette objection fut adoptée par 389 voix pour, 235 contre et 70 abstentions ! Un véritable camouflet pour la Commission européenne qui doit maintenant revoir sa copie et faire une autre proposition de critères pour les perturbateurs endocriniens. À moins qu’elle ne soit tentée de jouer la montre et de ne rien faire en attendant la révision prochaine du règlement européen sur les pesticides, révision qu’elle espère à la baisse… Mais, changeant une nouvelle fois de pied, la France demande maintenant instamment à la Commission européenne de faire une nouvelle proposition de critères, sans cette dérogation litigieuse. Grâce au vote du Parlement européen l’adoption de meilleurs critères pour les perturbateurs endocriniens redevient donc possible !