Plus de 260 organisations et collectifs organisent une Conférence nationale citoyenne sur l’accueil et les droits des personnes migrantes en France, au printemps 2018, en réaction au Plan Migrants dévoilé par le gouvernement cet été. En quoi ce plan gouvernemental est-il critiquable ?
Nous attendions autre chose d’un gouvernement qui se dit incarner « le renouveau ».
La politique migratoire représente un terrain d’expression idéal pour cette révolution copernicienne si chère à Emmanuel Macron… Pourtant, l’accueil des exilé·es reste essentiellement appréhendé sous l’angle sécuritaire, sans aucune vision globale à moyen et long terme, ni anticipation.
Ce que nous propose le gouvernement est la poursuite de la même politique de l’échec que celle de ses prédécesseur·es. Un signal fort aurait été de placer tout de suite la question migratoire sous la tutelle partagée des ministères des Solidarités, des Affaires étrangères et de la Cohésion des territoires. Aujourd’hui, comme hier, c’est le ministère de l’Intérieur qui reste seul en charge du dossier et qui agite obstinément l’argument aussi fallacieux que dépassé de « l’appel d’air ». Mais les flux ne se tariront pas tant que les gens auront besoin de fuir leurs pays pour survivre. La France est aujourd’hui devenue un terrain d’opérations humanitaires et la situation ne fait qu’empirer. La politique de non-gestion, de harcèlement, de pourrissement est un accélérateur d’insécurité pour tout le monde : migrant·es, aidant·es, riverain·es.
Quels sont les axes qui vous semblent importants à promouvoir dans la politique migratoire de la France ?
D’abord un objectif clair : passer d’une politique d’hostilité à une politique d’hospitalité.
Il faut que cesse sur le champ la chasse au migrant·es et la criminalisation de l’aide. Nous réclamons un changement radical d’attitude des forces de l’ordre, notamment pour mettre fin au harcèlement, aux perturbations des distributions alimentaires mais aussi aux expulsions vers les pays où les civil·es ne sont plus protégé·es. Nous dénonçons également la catégorisation des migrant·es. C’est une approche d’un autre âge. On ne peut nier aujourd’hui la porosité entre les différentes crises : dérèglement climatique, crises politiques, conflits armés, etc.
Est-il plus acceptable de mourir de faim que sous les bombes ? C’est pourquoi le mouvement Emmaüs se mobilise pour la libre circulation et la renégociation des traités internationaux. Nous avions demandé au chef de l’État de convoquer une conférence nationale avec toutes les personnes concernées – élu·es, gouvernement, associations, citoyen·nes – pour répondre à l’urgence tout en dessinant une politique de long terme. À ce jour, nous n’avons pas été entendu. Mais nous ne comptons pas en rester là.
Quels sont les objectifs de la Conférence citoyenne que vous organisez au printemps 2018 ?
C’est justement ce sur quoi nous travaillons avec Emmaüs International et nos partenaires associatifs, comme la Cimade, la LDH, le Secours catholique et Médecins du monde.
Nous nous sommes d’ailleurs réuni·es avec plus de 100 organisations et collectifs citoyens samedi 7 octobre, pour lancer la préparation d’une grande consultation nationale et définir collectivement les objectifs de ce processus de concertation citoyenne. Nous souhaitons devenir une force de proposition collective pour construire des politiques alternatives et poser les bases de réflexion pour changer la société.
Pour en savoir plus :
Emmaüs France, 47 avenue de la Résistance, 93104 Montreuil Cedex,
tél. : 01 41 58 25 00, http://emmaus-france.org