15 000 participant·es, 300 bénévoles, 220 visites de fermes. Après trois mois de péripéties et 3 300 kilomètres à vélo, le « Fermes d’avenir Tour » s’est achevé le 14 septembre 2017. Ce mouvement est né à la ferme de la Bourdaisière, à Montlouissur-Loire (Indre-et-Loire). Celle-ci s’étend sur 1,4 hectare, dont 8 000 m² de cultures maraîchères diversifiées. L’objectif de cette expérimentation lancée en 2013 était d’évaluer la viabilité technique et économique de petites fermes inspirées de la permaculture et conduites en maraîchage biologique intensif.
De petites fermes, donc, mais une grande ambition. D’aucun·es reprochent à l’association sa longue liste de partenaires plus ou moins vertueux. Comme Decathlon, partenaire du Fermes d’avenir Tour, qui n’hésite pas à construire ses « villages sportifs » sur des terres agricoles. Mais il y aussi Renault, qui triche sur ses émissions de polluants, Schneider Electric, Casino, Fleury Michon…
« Si l’on veut nourrir toute la population en bio, il faut travailler avec tout le monde », se défend Maxime de Rostolan, fondateur et directeur de Fermes d’avenir. Y a-t-il une ligne rouge ? « Jamais je ne travaillerai avec des vendeurs de pesticides comme Bayer ou Monsanto ».
« Il n’y a pas assez de recul sur la viabilité du concept »
Une stratégie d’ouverture, une communication efficace, un réseau influent : ces ingrédients ont permis à l’association de se faire une place dans le paysage national… Pas toujours appréciée par les porteu·ses historiques de l’agriculture paysanne ou biologique. Parmi les points de friction, la viabilité économique de ces petites fermes.
Une première étude menée par l’Inra de 2011 à 2015 au Bec Hellouin, en Normandie, a montré la potentialité d’un tel système : sur cette ferme biologique sophistiquée, une surface de production maraîchère d’environ 1 000 m² (0,1 ha) permet de dégager un revenu acceptable. Mais « aujourd’hui, on ne peut pas affirmer qu’une ferme de 1 000 m² puisse être viable, tempère François Léger, principal auteur de l’étude et enseignant chercheur à AgroParisTech. Le discours de Fermes d’avenir, centré sur un message optimiste, pourrait laisser entendre que la viabilité est déjà prouvée. Or, nous n’en sommes qu’aux prémices ».
L’avantage des petites fermes ? De faibles surfaces et des charges minimales, qui les rendent accessibles à des candidat·es avec une faible capacité d’investissement, comme c’est souvent le cas des néo-paysan·nes. Mais la tendance de l’agriculture reste à l’agrandissement. « Le risque serait de voir apparaître un modèle dual, avec un noyau de microfermes d’un côté, et des exploitations de plus en plus concentrées de l’autre », craint Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac France.
Aujourd’hui, Fermes d’avenir change justement d’échelle en se donnant pour objectif de lancer une expérimentation dans trois fermes de 60 hectares, la taille moyenne d’une exploitation française.