La faillite a été provoquée par les surcoûts importants rencontrés dans le cadre de la construction de deux réacteurs nucléaires, l’un en Caroline du Sud, l’autre en Géorgie. Il s’agissait d’un nouveau modèle qui devait concurrencer l’EPR d’Areva. Il s’agit des seuls réacteurs mis en chantier depuis l’accident de Three Mile Island, en 1979 (1). La firme y a déjà perdu plus de 6 milliards de dollars. L’arrêt des chantiers pourrait conduire Toshiba à rembourser les aides publiques reçues soit 2,6 milliards supplémentaires. Suite à cette annonce, le directeur de Toshiba a démissionné. Le Figaro du jour écrit « L’affaire apporte un argument de plus à ceux qui pensent que l’énergie nucléaire n’est plus viable ».
Une filière de plus en plus en difficulté
L’équivalent chez nous de Westinghouse est Areva. Si nous étions dans le cadre d’un marché libre et non faussé comme on dit à l’Europe, Areva aurait déjà dû être déclaré en faillite depuis longtemps, emporté par les surcoûts des EPR en construction. Mais l’Etat français a décidé de renflouer l’entreprise.
Dans les autres pays, le canadien Candu et le suédois ABB ont déjà renoncé à leurs activités nucléaires. L’étasunien General Electric et le japonais Hitachi sont à l’arrêt. En Allemagne, E.on et Siemens se sont retirés du marché (2) tout comme Engie en France.
Au Japon, depuis l’accident de Fukushima, le secteur du nucléaire ne résiste que parce que là aussi, l’Etat injecte des milliards.
Restent trois constructeurs de centrales qui persistent : Rosatom en Russie, la Compagnie nucléaire nationale chinoise et Korea Hydro and Nuclear Power en Corée du Sud. Ces entreprises disposent de fonds importants de la part de leurs Etats respectifs. La Chine mise toutefois maintenant plus sur les énergies renouvelables que sur le nucléaire. La Corée du Sud doit faire face à une vaste opposition du public depuis l’accident de Fukushima.
L’évolution des coûts du solaire et de l’éolien devraient entrainer tout le monde dans la même direction… Reste la question de savoir si les armées de chaque pays ne vont pas imposer de poursuivre le nucléaire pour continuer de se fournir en matériel fissile pour l’arme atomique (3).
La France entrainée par la chute de Westinghouse ?
La faillite de Westinghouse va faire des vagues bien au-delà des Etats-Unis : en 2011, EDF avait commandé des générateurs de vapeur (450 tonnes chacun) pour des renouvellements dans ses réacteurs. Au moins 12 restent à livrer. En décembre 2014, EDF a signé une commande pour la livraison de milliers de barres de combustible pour alimenter ses réacteurs. Il va devoir trouver un autre fournisseur (4)…
Michel Bernard
(1) Il reste 99 réacteurs en fonctionnement aux Etats-Unis, tous ont plus de 30 ans.
(2) Siemens laissant Areva s’embourber seule dans la construction des EPR.
(3) Le plutonium se désintégrant, il devient moins pur et moins réactif avec le temps, et il faut le renouveler pour maintenir en état les bombes nucléaires.
(4) Westinghouse fournissait le combustible à 145 centrales dans le monde sur 250.