Brève Chronique L’écologie c’est la santé Santé

Perturbateurs endocriniens : la commission européenne soutient les industriels

François Veillerette

La question des perturbateurs endocriniens (PE) est décidément au centre d’une intense bataille en Europe. L’enjeu de cette bataille est simple : publier des critères permettant de définir quelles substances pesticides ou biocides seront considérées comme des perturbateurs endocriniens devant être interdits en Europe. Pas moins. La bataille pourrait paraître purement technique. Il s’agit bien au contraire d’une intense confrontation de nature politique entre des intérêts privés – ceux de l’industrie chimique soutenue par les syndicats agricoles les plus conservateurs- et les défenseurs de la santé et de l’environnement.
Et pour l’instant, c’est l’industrie qui tient la corde dans cette lutte. La proposition de la Commission Européenne présentée en juin 2016 (avec plus de 2 années de retard) conduirait en effet à une définition extrêmement restrictive des produits qui pourraient être exclus en tant que PE. Un niveau de preuve extrêmement élevé serait ainsi requis puisqu’il faudrait prouver :
- que la substance est connue pour avoir un effet avéré pour la santé humaine,
- qu’elle a un mode d’action endocrinien,
- et qu’on connaît le lien causal entre le mode d’action et l’effet négatif.
Les textes adoptés en 2009 prévoyaient d’exclure les substances pouvant avoir un effet néfaste sur l’humain et non, comme dans cette proposition, ayant un effet avéré ! La différence n’est pas mince ! Des données sur l’animal ne suffiraient plus, il faudrait des données de toxicité certaine pour l’être humain. Cette approche sous-estimerait dramatiquement le risque pour les humains en ignorant de multiples données obtenues sur l’animal ! Il s’agit tout simplement d’un abandon de la prise en compte du principe de précaution pourtant prévue dans les textes votés.
De plus, les propositions de la Commission Européenne prévoient que des dérogations permettraient à des pesticides pourtant reconnus PE d’être autorisés si le risque est jugé négligeable pour l’être humain. Ceci est un autre recul inacceptable car le règlement de 2009 prévoyait de telles dérogations uniquement pour une exposition négligeable définie, comme l’absence de contact avec l’homme. Cette disposition ouvrirait un véritable boulevard à l’industrie qui pourrait maintenir sur le marché des pesticides pourtant reconnus PE !
Cette proposition est clairement inacceptable. Elle est même considérée comme illégale par certains qui voient là une réécriture des textes votés en 2009, ce qui dépasse le mandat de la Commission. Une note positive : jusqu’à présent la France a une position très en pointe sur ce dossier puisqu’elle est proche de celles des ONG, et que l’ANSES a publié en juillet une évaluation très critique des critères proposés par la Commission.

François Veillerette

Générations Futures
www.generations-futures.fr

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