Hao est un atoll perdu au milieu du Pacifique, ancienne base dite « avancée » des essais nucléaires de Moruroa entre 1966 et 2000. L’armée y décontaminait à grande eau les avions qui prélevaient des poussières radioactives dans le champignon des bombes. En 2005, le parlement de la Polynésie avait invité la Criirad pour faire le point sur ces lieux qui étaient devenus une poubelle à ciel ouvert. Le rapport Criirad laissait ouvertes de nombreuses questions, faute d’avoir les moyens d’une expertise approfondie. Les Polynésiens ont donc demandé au ministre parisien de la défense de faire réaliser une opération de levée de doute radiologique sur cet atoll habité où se trouve un collège pour les enfants de toutes les îles de l’Est des Tuamotu. Ce fut un niet catégorique, plusieurs fois répété, au motif que l’armée et le CEA avaient tout vérifié… lors d’un survol en hélicoptère !
En 2012, une expertise indépendante découvre sur Hao des zones gravement contaminées par du PCB, des hydrocarbures et des métaux lourds. Le fond du lagon est jonché de carcasses de véhicules et matériels militaires et de nombre de batteries au plomb. Le rapport des experts recommande aux insulaires de ne consommer du poisson qu’une fois par mois alors que c’est leur source de protéines quotidienne ! Chargée de réhabiliter Hao, l’armée décide alors de procéder à l’enlèvement des sols les plus contaminés et de les rassembler dans un stockage annoncé comme « provisoire » sur l’atoll même. Les protestations du conseil municipal et des associations locales sont véhémentes : « C’est vous qui avez laissé cette m… , remportez tout chez vous ! »
Hélas ce n’est pas tout. Le 10 décembre 2015, se tient à Papeete une réunion de la commission locale d’information sur le suivi des essais nucléaires. La nouvelle est donnée par le Haut-Commissaire de la République : « Des forages ont permis de découvrir du plutonium sous les dalles de l’aire de décontamination des avions. » Comme l’avait suggéré la Criirad en 2005, cette présence de matières nucléaires dans les sols était prévisible puisque l’eau de lavage contaminée s’écoulait directement dans les sols avant de se perdre dans l’océan. Les experts de l’IRSN, venus spécialement de Paris, annoncent pourtant qu’on laissera le plutonium en l’état ! L’exaspération est à son comble du côté polynésien au point que François Hollande de passage à Papeete le 22 février 2016, n’a pu manquer cette pancarte de l’association 193 « Hollande repars avec ton plutonium ». Le président de la République a vite ajouté dans son discours aux élus que l’atoll de Hao serait dépollué « en recourant à des méthodes les plus modernes ». Les Polynésiens attendent de pied ferme la réalisation de cette promesse.
Bruno Barrillot
25 février 2016