« Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous » avait écrit Paul Éluard. Portés par le voyage, nous sommes arrivés en octobre 2015 au petit village de Kingston au Nouveau-Mexique (États-Unis), pour la 20e édition du « Natural building colloquium » organisé par Builders Without Borders (Constructeurs sans frontières). Si la tendance générale aux États-Unis est plutôt aux grosses villas bétonnées qu’aux petites maisons en paille, il existe dans ce pays un mouvement très dynamique pour construire autrement. "Les États Unis sont les plus gros consommateurs d’énergie de la planète. Et 50% de cette énergie va dans les maisons, pour les construire, les chauffer, les climatiser… Donc ici tout changement, aussi petit soit-il, peut faire une énorme différence" affirme Ianto Evans, l’un des pionniers du mouvement de la construction naturelle qui nous accueille à bras ouvert.
Il y a 20 ans, Ianto et d’autres précurseurs d’ écoconstructions comme Linda Smiley, Michael Smith, Matts Myhrman, Judy Knox, David Eisenberg, Sunray Kelly, Catherine Wanek… se sont réunis une semaine dans ce même village. L’idée était de prendre le temps de se connaître, d’échanger des idées et des techniques pour qu’une dynamique collective émerge. Le réseau s’est lentement, mais sûrement renforcé : 20 ans plus tard, plus de 150 personnes sont venues des quatre coins des États Unis, mais aussi du Japon, de Taïwan, du Canada, d’Australie, d’Autriche, d’Angleterre, du Mexique, de France…
La construction naturelle est un point de départ pour d’autres changements plus profonds. Pour Ianto Evans "on veut changer la société, en repensant notre rapport à la nature, aux autres, en se focalisant sur les besoins essentiels. Des millions de gens dans ce pays ne sont pas satisfaits de leur mode de vie qui va à l’encontre de leur éthique et crée des problèmes globaux. Ce qu’ils ne savent pas, c’est comment changer. Notre travail est de proposer des solutions, l’une d’elle est d’avoir une maison plus petite et qui apporte du confort. Par confort, j’entends que tu ne sois pas obligé de faire un travail qui va à l’encontre de tes convictions pour payer ta maison".
Prés de 50 conférences sont données par et pour les participants à partir de leurs expériences : la construction en sac de terre autour du monde, la récupération d’eau de pluie, l’histoire de la construction en bottes de paille… Pour allier le plaisir de faire, d’autres participants proposent des ateliers-démonstrations : un dôme en bottes de paille, une cabane dans les arbres, un four en brique de terre crue, un mur en sacs de terre sont notamment construits dans une joyeuse atmosphère. Le soir, des présentations sur des enjeux plus globaux retracent les batailles juridiques autour des codes de construction, ou analysent le potentiel de la construction naturelle pour enrayer le changement climatique…
Quelques participants organisent des cercles de discussion sur les stratégies pour élargir la construction naturelle au grand public. L’objectif étant qu’elle ne soit plus considérée comme "alternative" mais remplace, dans les esprits les constructions conventionnelles néfastes pour la santé et l’environnement.
Quant à nous, après un an et demi de tournage à filmer des projets dans différents pays, ce colloque a confirmé notre intuition : il existe bel et bien un mouvement planétaire, qui ne demande qu’à connaître ses membres pour se renforcer. Comme tous les autres, nous repartons gonflés à bloc pour continuer notre enquête !
Chloé Deleforge et Olivier Mitsieno
Pour en savoir plus sur ce colloque et les autres initiatives que nous filmons, rendez-vous sur notre site www.eco-logis.org à la rubrique « carnet de route » et sur facebook : ecologis.project
