Ces compteurs électriques font partie du réseau de distribution, donc appartiennent, sauf exception, aux collectivités territoriales, et sont gérés par ERDF (1). Leur installation est gratuite, ce que contestent certaines associations (Next-Up, Que Choisir ?) qui pensent que des modifications notoires sont apportées aux abonnements pour financer les travaux de remplacement. ERDF affirme qu’il n’en est rien : le coût de l’installation (5 à 9 milliards pour 35 millions de compteurs) (2) serait ensuite compensé par des économies réalisées dans la gestion du réseau, et dans la réduction des fraudes et vols d’électricité.
Les avantages du compteur
Pour ERDF, cela permet le changement de puissance, l’ouverture et la fermeture en 24 heures des compteurs lors des déménagements. Les facturations seront faites sur la base de données réelles et non plus estimées, ce qui évitera les rattrapages de facture ou les trop payés. Cela devrait permettre d’améliorer les diagnostics de pannes.
Pour le consommateur, il peut choisir de bénéficier de statistiques lui permettant une meilleure connaissance de sa consommation. Cela ne lui fait pas faire d’économie, mais peut faciliter l’étalement de sa consommation (notamment dans l’optique où nous aurons des tarifs plus différenciés liés à la variabilité de la production des renouvelables ou pénalisants en pointe de consommation). Cela peut l’amener à changer certains comportements, à changer de puissance (ce sera gratuit), à faire jouer la concurrence. Si vous faites le choix de vous lancer dans la production électrique, par exemple avec du photovoltaïque, vous pouvez mesurez votre production avec le même compteur que celui qui mesure votre consommation. Ces arguments font que des associations qui travaillent sur la transition énergétique, comme Négawatt, sont favorables à ce nouveau compteur.
Des dangers difficiles à appréhender
Des associations (3) alertent sur la dangerosité des champs que dégageraient ces compteurs à leur proximité, mais également le long des câbles électriques du fait de l’utilisation de courants porteurs en ligne (CPL). Il est certain que ces CPL existent en amont du compteur (pour le relevé automatique), mais, par contre, pas sûr qu’ils existent en aval si vous n’optez pas pour des fonctionnalités comme de pouvoir mettre en route une machine, un thermostat… à distance. Ils n’existent pas de manière continue (quelques secondes par jour selon ERDF).
Avec 200 000 compteurs Linky installés, la région de Lyon est une région test depuis 2010. Nous avons donc contacté différentes personnes pour connaître leur avis (4) et collecté une trentaine de réponses : aucune n’a observé de variation dans ses factures, aucune n’a ressenti de variations au niveau des ondes électromagnétiques et une seule a utilisé les fonctionnalités du nouveau compteur pour participer à un programme d’économie d’énergie. Evidemment, ceci ne prouve pas l’innocuité du compteur.
Nous avons sollicité l’association Next-Up qui nous a envoyé de nombreux dossiers… mais qui s’est avérée incapable de nous indiquer des personnes qui auraient des problèmes avec ce compteur. Nous sommes entrés en contact avec une journaliste indépendante qui nous a mis en relation avec une personne dont le témoignage est intéressant : cette personne, électrosensible, ascensoriste de métier, a remarqué qu’elle souffrait plus dans les immeubles équipés du Linky. C’est la proximité des compteurs sur les paliers d’immeuble qui lui pose problème.
Il est donc probable que cela n’arrange pas la situation pour les personnes électrosensibles… mais pour le moment, il semble que cela ne soit sensible qu’à proximité du compteur.
Les CPL créent un champ électromagnétique, comme tous les courants électriques alternatifs, dont l’intensité diminue rapidement avec la distance : il est indétectable à 2,5 m du compteur et à quelques centimètres des câbles électriques. Ces CPL sont déjà utilisés depuis plusieurs dizaines d’années par ceux qui ont des tarifs heures creuses (5).
Quelques mesures de prudence
Il n’existe, à priori, aucun moyen pour s’opposer à leur installation. ERDF se contente de remplacer le compteur existant. Si celui-ci est proche de vos chambres, vous pouvez essayer de demander qu’il en soit éloigné, mais vous allez devoir batailler au niveau administratif : ce sont généralement des sous-traitants pressés qui font ce genre de travaux et cela aura un coût.
Si vous avez des problèmes d’électrosensibilité, avec le compteur Linky ou avec d’autres émissions électromagnétiques sur votre réseau électrique, la solution passe par l’installation de câbles blindés (6).
D’autres inconvénients que pour la santé ?
Selon l’ADEME, 30 millions de compteurs communicants augmenteront la consommation nationale d’électricité de 0,3 à 0,4 térawattheure (7) par an, soit 0,07% de notre consommation.
Du fait de la présence d’électronique, ils auront sans doute une durée de vie moindre que les actuels compteurs (certains avancent un remplacement tous les quinze ans).
Comme ils peuvent mesurer des données plus précises, certains craignent que cela puisse servir à surveiller leur vie privée. Ce qui ouvre d’autres débats…
Michel Bernard et Jean-Louis Gaby.
(1) ERDF : Electricité Réseau Distribution France.
(2) La Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) avait estimé le coût de généralisation de Linky, aux 35 millions de foyers, à 8 à 9 milliards d’euros alors qu’ERDF estime officiellement ce coût à 5 milliards.
(3) Par exemple : http://www.robindestoits.org/Les-effets-nocifs-des-compteurs-intelligents-reconnus-Maison-du-21e-Siecle-13-11-2013_a2103.html
(4) Nous avons utilisé une liste de 3000 sympathisants du Réseau Sortir du nucléaire, donc des personnes sensibles à la question énergétique.
(5) Les témoignages sur des sites d’électrosensibles parlent beaucoup de wifi, téléphones portables, antennes relais, box internet… et de craintes pour le Linky, mais pas de cas concrets !
(6) Ils sont en vente notamment dans les magasins d’informatique.
(7) TWh = térawattheure = milliards de kWh.
