En 1973, une coopérative laitière de la région décide de diversifier ses débouchés en créant une usine de fabrication de glaces. Au fil du temps, l’usine grossit et fait des choix de plus en plus discutables : lait en poudre au lieu de lait frais, arômes artificiels au lieu de fruits, gonflage à l’air pour gagner en volume. L’usine fait l’objet de plusieurs reventes jusqu’à tomber entre les mains d’une multinationale anglo-allemande financée par un fonds d’investissement états-unien en 2011. Celle-ci brade alors les services les uns après les autres et annonce la fermeture du site en juillet 2012… La production est bénéficiaire, mais pas assez rémunératrice pour les actionnaires. Cent vingt-quatre salariés sont alors licenciés.
Tout doucement, un projet de société coopérative de production (SCOP) mûrit ; 19 sociétaires y investissent chacun 5000 € et 45 % de leurs droits au chômage. Des négociations s’engagent : l’agglomération de Carcassonne rachète une partie des locaux. Outre les indemnités de licenciement, la SCOP obtient de conserver quelques machines, ainsi que 815 000 € d’aide de l’ancienne entreprise pour faciliter la formation et les investissements. Aucun cadre ne reste sur place : ce sont 19 ouvriers qui doivent s’auto-organiser.
Retour au local et à la qualité
Il décident de recentrer la production : ce seront maintenant des glaces artisanales haut de gamme, cherchant à valoriser le local (en lien avec une coopérative du département pour les fruits, une entreprise locale pour le conditionnement), la qualité (sans arômes artificiels, sans colorants, mais toutefois pas bio) et l’originalité. De 2800 pots à l’heure avant 2012, la production reprend avec seulement un objectif de 600 pots à l’heure. La SCOP, nommée La Fabrique du Sud, lance une nouvelle marque : La Belle Aude.
L’Union régionale des SCOP a aidé pour la formation et finalement les ouvriers ont réussi à réaliser toutes les tâches nécessaires sans avoir à embaucher à l’extérieur. Cela a de nombreux avantages : ils ont redéfini les rythmes de travail, choisi eux-mêmes les parfums diffusés… Christophe Barbier, aujourd’hui commercial, conclut que si parfois cela a été lourd à gérer, c’est une aventure humaine très enrichissante.
M. B.
• La Belle Aude, 5, rue Edouard-Branly, Z. I. La Bouriette, 11000 Carcassonne, tél : 04 68 10 18 94, www.labelleaude.com
• La Belle Aude, l’aventure d’une coopérative, Yannick Amossé, Le Temps des cerises, 2015.