On s’imaginerait difficilement en Europe installer une ruche dans son jardin sans posséder de solides connaissances en apiculture et un équipement adéquat. Encore moins lorsqu’on habite avec des enfants ou des personnes vulnérables aux piqûres d’abeilles. A São Paulo, Gerson Pinheiro, lui, possède une trentaine de ruches dans son arrière-cour et s’en approche sans protection.
Préserver les butineuses
Aucun danger à redouter : les abeilles qu’il élève ne piquent pas. La vingtaine d’espèces qui tourbillonnent autour de lui sont toutes natives du Brésil et appartiennent à la famille des meliponidae. Ces abeilles n’existent pas en Europe, car elles ne supportent que les climats tropicaux. Ces insatiables travailleuses encore peu connues jouent, comme leurs cousines avec dard, un rôle primordial dans la nature : la pollinisation.
« C’est ma fille qui, il y a cinq ans, m’a parlé de ces abeilles après une sortie en forêt avec sa classe », raconte Gerson. Depuis, cet agent administratif à la retraite qui vit dans une petite maison d’un quartier résidentiel, s’est piqué d’une passion dévorante pour ses petits bêtes. « Leur habitat naturel est détruit par la déforestation, l’agriculture intensive et l’urbanisation. De plus les gens démolissent les nids quand ils en ont chez eux, par peur et ignorance ! » Avec des amis, il a donc créé le collectif « SOS abeilles sans dard », dont la mission est d’organiser des« sauvetages » de nids, de former des gardiens et de révéler au grand public l’intérêt et les avantages de la préservation des abeilles mélipones.
Une pratique ancestrale et accessible
L’abeille« jatai » est l’espèce la plus répandue en ville. Elle s’accommode très bien des boîtes aux lettres et des compteurs électriques. La mandaçaia niche dans les gros arbres de la forêt atlantique du littoral brésilien. Chacune des espèces a une organisation et un type de ruche différent. Certaines ne sont pas plus grosses que des moucherons. Il y en a des noires et des brunes, à rayures ou monochromes. Leur miel aussi est différent. Certaines en produisent en très petite quantité.
Toute personne qui souhaite avoir une ruche chez elle doit d’abord suivre une courte formation pour apprendre les bonnes pratiques avant de recevoir sa petite ruche en bois et sa colonie ouvrière. Il y a une liste d’attente, car l’équipe doit attendre d’avoir un nouvel essaim issu d’un sauvetage ou d’une démultiplication d’un groupe déjà domestiqué.
La motivation des « gardiens », comme ils se surnomment, est de préserver la biodiversité en offrant protection et habitat à ces êtres indispensables à l’écosystème végétal. « SOS abeilles sans dard » privilégie les demandes qui proviennent d’organismes aptes à les aider à faire connaître au plus grand nombre leur combat, comme les centres de loisirs ou les jardins communautaires.
Mathilde Dorcadie