C’est bien parce que nous souhaitons que le présent de nos luttes soit le plus possible à l’image de nos rêves et de nos envies qu’un peu partout, des mouvements de contestation emploient des formes d’action imaginatives, donnant à vivre des moments désirables en soi. (1)
C’est pourquoi ce dossier rend compte de formes d’action politique qui sortent de la seule logique rationnelle du militantisme « classique » pour déborder de toutes parts, vers le monde de l’art, du quotidien, du jeu et de l’humour.
Déjà au début des années 1980, des femmes du mouvement pacifiste et écoféministe renouvelaient les formes d’action directe non-violente contre les armes nucléaires des Etats-Unis :
« Nous dansons, car après tout c’est ce pour quoi nous nous battons, disaient-elles. Pour que continuent, pour que l’emportent, cette vie, ces corps, ces seins, ces ventres, cette odeur de chair, cette joie, cette liberté ». (2)
Chaque jour, partout dans le monde, des femmes et des hommes continuent à inventer des manières astucieuses et joyeuses d’avancer, de créer à rebours des puissances destructrices, déjouant le piège de la seule contestation négative.
Car la politique est aussi une affaire d’affects, et la joie est un moteur puissant pour donner envie d’agir.
Ce dossier explore les terres où l’action politique de rue s’hybride avec les démarches artistiques, se fait jeu, déborde de son lit pour ensemencer les espaces du quotidien qui l’entourent (3).
Guillaume Gamblin
(1) C’est aussi par cette exigence de cohérence entre les fins visées et les moyens utilisés que les militants font un usage prudent de la violence et que les actions non-violentes se multiplient depuis quelques décennies.
(2) Rêver l’obscur. Femmes, magie et politique. Starhawk, éd. Cambourakis, 2015, 380 p.
(3) Ce dossier ne reprend pas la thématique des graffs que nous avons développé dans le n°376 « Les murs, médias alternatifs ».