S’il est fréquent d’entendre parler basque ou catalan lorsque l’on voyage au sud de la frontière franco-espagnole, les choses changent dès que l’on met les pieds sur le territoire français. Rien de naturel à cela : c’est plutôt le fruit de politiques linguistiques contrastées.
Nous vivons dans un Etat construit sur une tradition républicaine jacobine qui a mis en place, depuis plus de deux siècles, un véritable ethnocide des différentes cultures présentes sur le territoire national. Ce sont les langues régionales mais aussi les cultures et traditions qui leur sont liées qui ont été détruites avec application. Aujourd’hui, les différentes langues présentes sur le territoire français sont dans une situation critique.
Il en va de même pour la terre : d’un côté, le modèle productiviste entraîne des monocultures agricoles qui appauvrissent le sol et participent à l’érosion de l’humus ; et de l’autre, des cultures et des langues minorisées sont en voie de disparition. Ainsi la diversité des langues et des cultures, c’est à dire le prolongement de la biodiversité chez l’humain, est en train de disparaître au profit d’une société monolingue (1).
Le lien entre monolinguisme et monoculture végétale est très concret : l’une d’entre nous a constaté que son oncle et son grand-père connaissaient une quantité de salades sauvages, délicieuses, qu’elle mangeait il y a ... 50 ans. Ils en connaissaient le nom occitan. Il s’est avéré que la traduction française de ces noms n’a pas été faite ou transmise. Résultat, après le décès des anciens, le nom de ces salades (herbes comestibles) n’ayant pas été mémorisé ni traduit, il est bien difficile de les retrouver. Ces salades sauvages ont été, de fait, perdues.
Notre dossier donne la parole à des personnes engagées dans la défense et la promotion des langues régionales (2). Ce sont les acteurs de la résistance et de la vie de ces langues qui nous parlent de l’importance de faire vivre ce trésor linguistique et culturel. Et de leurs combats pour faire respecter le droit à la diversité.
Monique Douillet, Guillaume Gamblin et Divi Kerneis
(1) Le même phénomène se met en place, à une autre échelle, entre l’anglais et les langues d’usage au niveau européen, et bien malin le ou la député-e européen-ne qui ne voudra pas ou ne parviendra pas à utiliser l’anglais.
(2) Essentiellement les langues situées en métropole. Les autres n’ont été qu’effleurées dans ce dossier, tant le sujet est vaste et tant elles mériteraient un dossier à part entière.