En effet, le système repose depuis 1891 sur une combinaison d’éléments de représentation et de démocratie directe. Les deux Chambres législatives — le Conseil national (Nationalrat) et le Conseil des Etats (Standerat) — représentent respectivement le peuple et les cantons. Le passage d’une loi nécessite l’accord des deux Chambres. Et surtout, les référendums obligatoires et facultatifs, ainsi que l’initiative populaire, sont les droits civiques les plus importants. Par exemple, toute modification de la Constitution et tout traité international majeur sont soumis impérativement à référendum. La question posée n’est ratifiée que si le « oui » obtient la majorité absolue des votes exprimés et l’emporte dans la moitié des cantons (vingt cantons et six demi-cantons), la majorité simple n’étant pas suffisante.
La Suisse apparaît donc comme un exemple de démocratie directe en Europe. Pourtant, le niveau de la participation en politique est très faible, tant au niveau des scrutins que de l’engagement. Ce sont surtout les hommes aisés disposant d’un bon niveau de formation qui s’engagent. De plus, un cinquième de la population (20 % d’étrangers) n’a pas le droit de vote, et les taux de participation sont plutôt bas. Les chercheurs pointent d’autres défauts du système politique suisse : le manque de transparence (notamment sur le financement des partis) et un contrôle entre les pouvoirs très faible. La garantie légale de la liberté d’information n’a été introduite qu’en 2005 !
Le système démocratique helvétique révèle donc des paradoxes criants : une démocratie directe certes, mais qui autorise des politiques xénophobes et ne remet pas en cause la dépendance de la politique et de la justice envers la finance... La Suisse, paradis fiscal le plus démocratique d’Europe !
Gaëlle Ronsin
Source : Antoine Chollet, Défendre la démocratie directe, Le savoir suisse, 2011