Là encore, partage des richesses et réduction des inégalités sont considérés comme les éléments de base de toute réflexion. Les économistes d’ATTAC (2010) rappellent par exemple qu’une manière de compenser le déficit des retraites pourrait consister à soumettre à cotisation les dividendes, puisqu’une partie non négligeable des gains de productivité ont servi à augmenter la part de rémunération du capital, au détriment du travail, depuis le début des années 1980. « Mais, ajoute Jean Gadrey, il faut aussi développer des services hors logique marchande, (santé, culture et sport, transports collectifs…) et l’accès à des richesses non économiques (liens sociaux, participation citoyenne, richesses naturelles…) pour fonder le ‘bien vivre’ des retraités dans un monde soutenable. »
Jean Gadrey propose "quelques pistes pour raisonner autrement. Il faudrait :
privilégier les ingrédients du ‘bien vivre’ des retraités dans une société soutenable ; (…) l’association Babayagas milite pour des modes de vie fondés sur quatre piliers, qui sont leurs ‘produits de haute nécessité’ : autogestion, solidarité, citoyenneté et écologie. Cela implique certes des ressources financières, mais de façon sobre et partagée (…) ;
fixer un revenu maximum pour tous les citoyens, actifs ou retraités, défini comme multiple raisonnable d’un revenu minimum décent (…) ;
réfléchir à la fois au financement des pensions et à celui de services collectifs gratuits ou fortement subventionnés (…) dédiés à l’amélioration de la qualité de vie des seniors (…) ;
produire des richesses et des valeurs économiques autrement, sans croissance quantitative (…) avec une progression de la qualité et de la durabilité, sources de valeur ajoutée et d’emplois. (…) Or le plein-emploi est un atout majeur pour le financement des retraites ;
maintenir le droit à une retraite de bonne qualité à 60 ans. (…) La retraite à 60 ans est un outil majeur (…) de partage du temps de travail (…) ;
dresser un bilan des dizaines de milliards récupérables annuellement sans croissance quantitative en prenant l’argent là où il est, en particulier dans l’excès de profits (…) :
enfin, intégrer dans le raisonnement une piste oubliée : celle de l’égalité des femmes et des hommes devant l’emploi de qualité et devant les salaires. (…) Tendre vers l’égalité professionnelle des femmes et des hommes serait une énorme source de richesses économiques, avec à la clé des emplois socialement utiles. Cela permettrait d’ajouter plusieurs dizaines de milliards d’euros au financement de la protection sociale, selon l’estimation proposée par Christiane Marty." (Gadrey, 2010)
Aurélien Boutaud