Daniel et Denise Guillon vivent dans une ferme située à cheval sur trois communes : Toulon, Ollioules et la Seyne-sur-Mer. En 1994, la seule commune d’Ollioules compte encore 140 exploitants agricoles, la plupart disposant d’importantes surfaces de serres. Un orage de grêle dévaste les serres. De très nombreuses exploitations s’arrêtent à ce moment-là. Aujourd’hui, il ne reste plus que cinq exploitants agricoles sur la commune.
Daniel et Denise ont eux aussi subi les foudres du ciel et se trouvent en difficulté financière. Décidés à ne pas s’arrêter, ils cherchent une solution. Après une discussion avec des associations d’Aubagne, ils mettent au point un système de paniers bio distribués en différents points de la ville, payés d’avance par les consommateurs. Cette pratique rencontre vite des échos favorables du côté des consommateurs.
Pour assurer la gestion de cette production et de cette distribution, ils créent une association pour le maintien de l’agriculture paysanne. La première AMAP vient de naître. Ils ne savent pas encore que leur initiative va être reprise par des centaines de groupes de consommateurs qui parrainent ainsi chacun un ou des producteurs bio.
Leur ferme, la ferme des Olivades, produit des légumes et des fruits tout au long de l’année grâce à un climat particulièrement agréable : la mer, à quelques kilomètres, évite les risques de gel. Ils disposent de quatre hectares de légumes de plein champ, de quatre hectares de vergers diversifiés et de près de deux hectares de serres.
Depuis longtemps, la ferme est en bio. On y applique des méthodes de lutte intégrée et des auxiliaires pour lutter contre les parasites. Les engrais sont organiques. Le travail du sol respecte les équilibres biologiques et contribue à l’enrichissement de la terre et de l’environnement.
Un lien solidaire, un bénéfice réciproque
Le coup de génie dans l’AMAP est le lien très fort qui relie le producteur aux consommateurs. En s’engageant financièrement, en début d’année, à prendre un certain nombre de paniers, le consommateur assure une régularité dans les débouchés pour le producteur, qui peut ainsi gérer sa production au plus juste et éviter les invendus et les gaspillages. En retour, comme il n’y a plus de pertes ou presque, l’agriculteur peut vendre moins cher et le consommateur dispose de produits bio aux meilleurs prix. Le bénéfice est réciproque et c’est pour cela que ça marche si bien.
Le panier de base est calculé pour une famille de deux adultes et deux enfants, mais il est possible de se mettre à plusieurs sur le même panier si l’on est célibataire ou si l’on n’a pas deux enfants. Dans une Lettre diffusée régulièrement, le producteur indique son calendrier de production, rappelle les jours où l’on peut retirer son panier et donne des informations complémentaires : recettes, rendez-vous…
Pour Daniel et Denise, aujourd’hui, il y a trois distributions par semaine : deux se font sur la ferme pour les personnes de l’agglomération de Toulon, la troisième est livrée à Aubagne. Lors des distributions, la quantité est indiquée pour chaque fruit et légume et les adhérents pèsent ce qu’ils doivent prendre en fonction de la quantité précisée. Cela représente des quantités imposantes : en pleine saison, pour emmener une livraison à Aubagne, Daniel et Denise doivent louer une grosse camionnette. Au bas mot : 30 à 35 kg par panier ! Tout au long de l’année, les producteurs s’engagent à fournir au moins dix fruits et légumes différents par panier.
La contrainte pour le consommateur, c’est de partager les risques du métier avec l’agriculteur : culture abondante ou défaillante, avance ou retard de production dû à la météo de l’année… Le consommateur non seulement réapprend à manger de saison, mais il est en lien avec la nature par les aléas de production.
Pour mieux se connaître, différentes rencontres sont organisées. Au début de la saison, à l’automne, un pique-nique a lieu à la ferme avec chacun des groupes, ce qui permet de faire connaissance avec les nouveaux arrivants. Lorsqu’il y a une grosse production en vue, des animations sont mises en place pour ramasser collectivement les excédents et les transformer (ateliers sauces et confitures). Il est toujours possible, pour les plus passionnés, de venir aider aux récoltes et même plus ; Denise et Daniel n’hésitent pas à lancer des appels à « coups de mains » lorsque c’est nécessaire.
Retour à la terre
Au début, Daniel et Denise ont été extrêmement actifs pour aider d’autres agriculteurs à lancer leur propre AMAP. Ils ont contribué à mettre en place Alliance Provence, qui a commencé à aider la mise en place d’AMAP dans toute la région, puis un peu partout en France. Le couple a vite été débordé par les demandes de présentation de leur initiative. Ils ont concrètement aidé à mettre en place une cinquantaine d’AMAP. Ils ont ensuite décidé de prendre du recul pour avoir le temps de s’occuper correctement de leur propre ferme. Toujours très actifs localement, ils voient toutefois d’un œil critique le mouvement se structurer de plus en plus et craignent un phénomène d’institutionnalisation qu’ils jugent totalement inutile. Aujourd’hui, il existe une fédération nationale qui se bat pour avoir des subventions et l’administratif formel leur semble nuire à la convivialité. Ils sont pour l’autonomisation des initiatives et si certaines ne copient pas leur fonctionnement, ils n’y voient, eux, aucun inconvénient.
Convoitises
Localement, la situation de la ferme est explosive. La ville de Toulon continuant à s’agrandir, ils ont été rattrapés par les zones commerciales et, juste derrière leur ferme, se trouve un des plus grands parkings de l’agglomération, avec une zone commerciale hideuse qui souhaiterait encore s’agrandir. Mais cette dernière est coincée d’un côté par une autoroute, de l’autre par une villa classée par les monuments historiques. Elle ne peut donc que viser les bonnes terres maraîchères bio de Daniel et Denise Guillon.
Les élus sont venus les voir plusieurs fois pour leur assurer que s’ils vendaient, leur fortune était faite. Devant leur refus, la mairie de Toulon a prétexté un temps la nécessité de les exproprier pour pouvoir créer à leur place le terminus du futur tramway et une gare routière. L’AMAP s’est alors révélée une formidable caisse de résonance pour dénoncer les manœuvres diverses pour pousser les paysans dehors. Aujourd’hui, les projets semblent arrêtés (1) et Daniel en conclut qu’une AMAP n’est pas seulement une arme sociale pour le maintien de l’agriculture paysanne, mais peut être aussi un excellent outil contre la spéculation immobilière.
Michel Bernard
• Daniel et Denise Vuillon, Les Olivades, 257, chemin de la Petite-Garenne, quartier Quiez, 83190 Ollioules, tél : 04 94 30 03 13.
• Alliance Provence, 17, rue Daniel-Melchior, 83000 Toulon, tél : 04 94 98 80 00.
(1) Pour rappel, la mairie de Toulon, après sept ans de gestion Front national, est repassée à gauche en 2001.
Autres AMAP locales
Alpes-Maritimes
• Auribeau-sur-Siagne : AMAP, Johanne Blanc, tél : 04 93 42 36 31.
• Grasse : Nature et saveurs dans l’assiette, Josiane Jorcin, tél : 04 93 09 03 26.
• Le Cannet : AMAP de l’Espace, Olivier Campana, tél : 04 92 19 01 81. Amap mise en place par le personnel d’Alcatel, distribution uniquement au sein de l’entreprise.
• Le Cannet : AMAP Les paniers de la Siagne, Anne Marie Eymery, tél : 04 92 18 18 28.
• Mouans-Sartoux : AMAP Les paniers de nos campagnes, Pascale Renot, tél : 04 93 60 19 02.
• Nice : AMAP Mondo Nice Gambetta, Gabrielle Boulay, tél : 08 70 74 43 63.
• Nice : AMAP des Colllines - Nice ouest, Béatrice Piston, tél : 06 63 57 24 53.
• Opio : AMAP’Opio, Philippe Le Bars, tél : 04 93 77 70 35.
• Valbonne : AMAP de la Ferme Saint-Jean, Anne-Marie Borrits, tél : 04 93 40 25 58.
• Villeneuve-Loubet : AMAP du Loup, Frédéric Stoll, tél : 04 93 22 82 75.
Var
• Aups : Amap d’Aups, Brindille Soubrane, tél : 04 94 84 22 78.
• Cogolin : Association des amapiens du Golfe, Georgette Kohrel - 06 16 55 02 83.
• Cogolin : AMAP Cogolin, Joëlle Taillefer, tél : 06 03 10 76 40.
• Draguignan : AMAP en Dracénie, Michèle Perez, tél : 04 94 68 06 19 (voir article page @@@).
• Draguignan : AMAP Draguignan, Elvire Segovia - 04 94 47 19 59.
• Fayence : AMAP pays de Fayence, Claire Aubert, tél : 04 94 76 29 63.
• Figanières : AMAP Figanières, Véronique Gérard, tél : 04 94 67 81 59.
• Fréjus : AMAP Fréjus, Marianne Hauteville, tél : 04 94 52 95 83.
• Hyères : AMAP Costa Hyères, Brigitte Bayrou, tél : 04 94 35 09 30.
• Hyères : AMAP Sauvebonne, Christelle Gros, tél : 04 94 35 71 40.
• Hyères : AMAP Isabelle, Isabelle Besse, tél : 06 03 10 01 83.
• La Crau : AMAP La Marseillaise, Bernard Ferran, tél : 04 94 20 09 19.
• La Moutonne : AMAP Le Jardin de Bernard, Alain Helft, tél : 04 94 46 42 91.
• La Seyne-sur-Mer : AMAP de Clairval, Nathalie Tonnelier, tél : 04 94 34 59 33.
• Le Beausset : AMAP Le Beausset, Patricia Bœllinger, tél : 04 94 90 59 39.
• Les Arcs : AMAP Les Arcs, Jean-Claude Roget, tél : 04 94 47 52 43.
• Ollioules : Les Paniers de la Farigoulette, Nadine Lee-a-hing, tél : 04 94 30 71 01.
• Le Cannet-des-Maures : AMAP Cannet-des-Maures, Geneviève Pessel, tél : 04 94 73 40 00.
• Roquebrune : AMAP, Aurélie Dumont, tél : 04 94 95 91 09.
• Sainte-Maxime : AMAP, Christian Mousset, tél : 04 94 49 12 52.
• Saint-Maximin-Brignoles : AMAP’tite planète, Philippe Raignault, tél : 04 94 59 41 35.
• Saint-Maximin-Barjols : AMAP de la Sainte-Baume, François Bonnet, tél : 04 94 72 18 45.
• Sollies-Pont : AMAP Le Grand Jardin, Jean-Claude Bodino, tél : 04 94 13 00 07.
• Trans-en-Provence : AMAP, Alexis blanc, tél : 06 25 39 10 22.